mardi 7 janvier 2014

Éric qui flotte

Jadis, je me tenais avec Éric et Sébastien. Le premier était drummer, le deuxième guitariste. À l'origine, on voulait former un band tous les trois et, chose curieuse, en à peu près 5 années d'amitié, on n'a jamais joué ensemble tous les trois. En fait, on ne s'est vus tous les trois qu'à de rares occasions.

Généralement, je sortais avec Éric ou je jouais de la musique avec Sébastien. Les deux n'étaient presque jamais disponibles en même temps.

Sébastien était un gars bizarre, du type bipolaire. Mais Éric était fucké lui aussi. Au premier contact, il semblait plus équilibré que Sébastien, mais après quelques minutes, on réalisait vite que quelque chose clochait avec lui aussi.

Né au début des années 70, ayant habité avec ses parents jusqu'à un âge avancé (genre 35 ans), fabulant au sujet de plein de filles qui selon lui trippaient sur son cas parce qu'elles avaient croisé son regard (combien de fois on a parlé ensemble au téléphone pendant que lui, sur son cellulaire, croisait le regard d'une inconnue et pensait qu'elle trippait sur lui juste parce qu'elle l'avait regardée 2 secondes) mais n'ayant jamais de blonde ou, dans le meilleur des cas, couchant avec des danseuses ou fréquentant des junkies qui prennent de la kétamine ou de la drogue pour les chevaux. Par-dessus tout, Éric vivait dans les vapeurs. Il "flottait". En des mots plus précis, il se passait "fuckall" dans sa vie, mais il était mû par un genre d'optimisme imbécile, se disant entre autres qu'il pognait au boutte.

J'appréciais tout de même sa compagnie car, malgré son mode de vie pathétique, c'était un gars doux, à l'allure propre et plutôt sympathique. Mais, tel que mentionné plus tôt, il ne suffisait que de lui parler 5 minutes pour réaliser qu'il était un peu limité.

Mon ex-blonde Patachou m'avait un jour dit que je voyais presque tous mes amis comme des "accompagnateurs". C'était assez exact, hormis 3 ou 4 exceptions. Par contre, c'était tout-à-fait exact pour Éric. Ce type n'avait rien d'autre à m'apporter que de la compagnie pendant mes sorties. C'était un bon gars, mais s'il faut estimer quelqu'un pour être véritablement son ami, je ne pourrai jamais dire que Éric a été mon ami...

En fin de semaine, dans une allée d'épicerie, quelqu'un m'a interpellé pendant que je cherchais de la fécule de maïs. Je me suis retourné et c'était Éric, avec ses tempes maintenant grises et sa blonde qui était personnifiée par une fille avec les jeans déchirés et une allure d'ex-junkie.

Plus de cinq années après notre dernière rencontre, alors que je donnais un spectacle de rock classique au bar le Tonneau avec Sébastien, Éric était de nouveau en train de flotter comme un putain de guignol à côté de moi, me racontant sa vie dépourvue d'intérêt.

Flottant il y a 10 ans, flottant il y a 5 ans, flottant encore aujourd'hui.

Quelle ostie de ballade plate ne valant pas le détour que la vie de certains individus.

2 commentaires:

  1. T'as ben raison.

    J'ai plein d'amis/connaissances/membre de ma famille qui ont des vies que je juge plates: 2 bébés (le premier étant une «surprise», le deuxième une «suite logique»), un bungalow en banlieue (un investissement), un chien (les enfants en voulaient un) pis un voyage par année (C't'important «d'aller à la rencontre de l'autre»). C'est fucking plate et conformiste.

    J'ai des amies qui restent dans des demi sous-sol, monoparentales, 2 enfants, avec des jobs de commis dans des épiceries... Qui fument comme des trous pis qui n'ont jamais une cent de côté. Pis ces filles-là sont tellement heureuses, alors que moi, avoir cette vie-là, je me tirerais une balle...

    Je ne suis pas certaine si c'est parce qu'on s'adapte à la vie qu'on a ou ben si c'est parce qu'on se construit un univers qui nous convient, mais je pense que bien des gens sont «confortables» dans leur banalité.

    Je suis bien contente d'avoir MA vie plate, parce que la vie plate des autres me serait intolérable. L'inverse est aussi vrai: ma vie de famille reconstituée, ma job drabe pis mes ambitions insignifiantes, y a ben du monde qui n'en voudrait pas.

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  2. Je juge parfois les modes de vie des gens, mais dans le cas d'Éric, je juge sa stagnation qui m'apparait éternelle. Je pense que ce gars là était au même point à 16 ans qu'il en est rendu à 41 ou 42 ans. C'est juste qu'il a un char pis une maison asteur, mais pour le reste, je pense qu'il a stagné comme peu de gens ont stagné. Pis il vit dans sa tête en criss. Je gagerais 50$ qu'il pense encore que toutes les filles qui le regardent trippent sur lui.

    C'est spécial en maudit un gars de même.

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