mercredi 25 février 2015

Adieu mon chat

Mardi le 24 février
Mon chat est de plus en plus faible.
Pendant la soirée, je vais dans la pièce du sous-sol où je range mes instruments de musique. Je rentre et, horreur: mon chat a les griffes des deux pattes d’en avant accrochées sur le tissu de la chaise et pend jusque par terre, les yeux fermés.
J'ai le coeur en mille morceaux: elle est morte accrochée comme ça. Je penche la chaise et décroche ses griffes. Elle semble vivante, mais endormie. Sa bouche dégouline un peu sur moi. Ça va vraiment pas bien.
Je vais la coucher devant le poêle à bois qui est allumé. Je me dis que si elle est pour mourir, aussi bien mourir à l’endroit où elle est le mieux, soit à la chaleur du poêle. J’approche son plat avec son eau et sa bouffe auprès d’elle pour qu’elle puisse boire sans trop d'efforts étant donné qu’elle n’a presque plus de tonus.
Pendant la soirée, je fais une veillée mortuaire. Je suis convaincu qu’elle ne se rendra pas à la fin de semaine. En fait, elle ne se rendra probablement pas plus loin qu’une journée ou deux. Je la prends sur mes cuisses et la flatte, comme dans le temps où je faisais ça plus souvent.
Sa respiration est très lente. Elle est en mode semi-comateux dirait-on. Je me ferme les yeux pis j’essaye d’être en phase avec elle. Je me ramasse avec les yeux mouillés en absorbant toute la fatalité de la vie. 
Je recouche mon minou devant le poêle à bois en me disant que mes risques de la retrouver vivante le lendemain sont faibles.
Mercredi le 25 février
Je vais réveiller mon garçon et lui dis: "Viens, on va aller voir Félice parce qu'elle va probablement mourir aujourd'hui."
On n'aura plus de chat?
Non.
Pourquoi elle va mourir?
Parce qu'elle est très malade.
Moi j'ai pas le goût d'aller la voir, je veux jouer au Ipod!
Viens la voir, parce que tu pourras bientôt plus la voir si elle meurt...
Mais papa, c'est pas grave si elle meurt, c'est vraiment pas grave. On a encore un poisson (Touyou, le poisson du bocal du salon).
Avant d'aller voir mon chat avec fiston, je le fais déjeuner. Pendant ce temps, je descends au sous-sol pour prendre ma douche, je suis anxieux. J’ai peur d’ouvrir la porte du sous-sol et de tomber directement sur la carcasse morte de mon chat.
Je regarde devant le poêle et je ne vois rien. Je fais un rapide tour du sous-sol et toujours rien. Je pense ensuite au-dessous des escaliers qui mènent à l’étage. C’est l’endroit où mon chat s’est toujours réfugié quand elle ne filait pas, quand elle avait peur du tonnerre ou quand elle voulait être tranquille.
Je la retrouve couchée, dans l’ombre. Toujours en position moribonde, sans aucune force. Elle a réussi à se rendre jusque là depuis sa position de la veille mais j’imagine qu’elle s’est trainée sur ses pattes recroquevillées, comme une pauvre créature à l'agonie.
Cette fois, la respiration de ma chatte est presque nulle. Elle a des spasmes occasionnels dans ses pattes et dans son visage. Je suis devant un corps qui fonctionne avec trois atomes d’énergie.  C’est la fin pour vrai. Cette fois, j'ai vraiment le coeur en morceaux.
Je la flatte encore un peu, la déplaçant tranquillement pour la mettre près de son bol avec son eau. Je remarque qu’elle se sort la langue et je pense à tous ces mourants qui ont la bouche sèche et qui peuvent juste licher un cube de glace.
Je suis en train de voir un chat mourir, mais je vois en même temps la fin de la vie de tout le monde. 
Je redresse la tête de ma chatte pour lui faire licher un peu d’eau dans son bol. Elle a même pas assez de force pour se redresser la tête et licher son bol. Sa tête trempe dans l’eau et elle n'absorbe à peu près rien.
Je la regarde une dernière fois et je quitte pour reconduire mon gars à l’école... 
En journée, j'appelle chez un vétérinaire. Je demande si je peux faire euthanasier mon chat ce soir. On me répond qu'on aurait une place pour moi à 17h50. J'accepte l'offre.
Je reviens chez moi vers 17h et je descends dans le sous-sol.
Mon chat est encore à la même place que ce matin, dans la même position et les yeux ouverts. 
Je m'approche et pose la main sur elle pour sentir son souffle. Je ne sens rien, ou presque. 
Mais elle est raide. Tout le monde a déjà entendu dire qu'un mort, c'est raide mais j'avais jamais eu le malheur de le constater. Ses pattes ont été molles ces derniers jours, mais là, elles sont raides.
J'annonce à Aimepé que mon chat est mort pis je pars à brailler comme un bébé.
Je vide une boite de playmobils qui sert à rien pis je mets mon chat dedans. Je braille encore plus. Une calisse de boite de playmobil pour recevoir le corps tout raide du chat qui a été dans ma vie pendant 17 années et demi. Me semble que mon minou aurait mérité mieux qu'une ostie de boite de carton.
J'irai l'enterrer en fin de semaine, quelque part, je sais pas où. Peut-être dans un petit spot tranquille dans la forêt en arrière de chez nous.

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